samedi 8 février 2020

Littérature française - Vol de nuit

Vol de nuit

Antoine de Saint-Exupéry

Gallimard, Paris, [1931].

Coll. «Livre de poche», 3.


Voici les soulignements lors de la lecture de ce livre, à la fin des années 1960:


La lutte dans le cyclone, ça, au moins, c'est réel, c'est franc. Mais non le visage des choses, ce visage qu'elles prennent quand elles se croient seules. 35

Il fallait donner une âme à cette matière, lui créer une volonté. Il ne pensait pas les asservir par cette dureté, mais les lancer hors d'eux-mêmes. 49

Alignant dans un ordre misérable ses trésors, il étalait devant le pilote sa misère. Un eczéma moral. Il montrait sa prison. 59

« Regardez-moi ça, comme c'est beau, cette laideur qui repousse l'amour… » 62

« Ce soir avec mes deux courriers en vol, je suis responsable d'un ciel entier. Cette étoile est un signe, qui me cherche dans cette foule, et qui me trouve : c'est pourquoi je me sens un peu étranger, un peu solitaire. » 72

Il leva les yeux sur les hommes. Il cherchait à reconnaître ceux d'entre eux qui promenaient à petits pas leur invention ou leur amour, et il songeait à l'isolement des gardiens de phares. 73

« Cet homme-là ne sait pas sa grandeur. » 74

Rivière pensa : « Ce n'est pas lui que j'ai congédié ainsi, brutalement, c'est le mal dont il n'était pas responsable, peut-être, mais qui passait par lui. » 83

« Tous ces hommes, je les aime, mais ce n'est pas eux que je combats. C'est ce qui passe par eux… » 87

« Je ne sais pas si ce que j'ai fait est bon. Je ne sais pas l'exacte valeur de la vie humaine, ni de la justice, ni du chagrin. Je ne sais pas exactement ce que vaut la joie d'un homme. Ni une main qui tremble. Ni la pitié, ni la douceur… » 87

« La vie se contredit tant, on se débrouille comme on peut avec la vie… Mais durer, mais créer, échanger son corps périssable… » 87

Et fermant la porte derrière lui, il fit dans la rue, au milieu de l'inconnaissable peuple nocturne, le premier pas de sa conquête. Elle restait là. Elle regardait, triste, ces fleurs, ces livres, cette douceur, qui n'étaient pour lui qu'un fond de mer. 95

« Ce pont vaut-il le prix d'un visage écrasé ? » 127

« Ces hommes, pensait-il, qui vont peut-être disparaître, auraient pu vivre heureux. » Il voyait des
visages penchés dans le sanctuaire d'or des lampes du soir. « Au nom de quoi les en ai-je tirés ? » Au nom de quoi les a-t-il arrachés au bonheur individuel ?  ... 129

Il aurait pu lutter encore, tenter sa chance : il n'y a pas de fatalité extérieure. Mais il y a une fatalité intérieure : vient une minute où l'on se découvre vulnérable ; alors les fautes vous attirent comme un vertige. 137

Ces hommes qui continuaient leur travail, comme s'ils marchaient sur un corps, ces dossiers où la vie humaine, la souffrance humaine ne laissaient qu'un résidu de chiffres durs. 153

Son oeuvre était semblable à un voilier en panne, sans vent, sur la mer. 157

Une victoire affaiblit un peuple, une défaite en réveille un autre. 178

Photos: Pierre Rousseau - © 2019
Archives Pierre Rousseau
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