mardi 30 juin 2020

Sciences et techniques - Régions de Québec...

Régions de Québec, du Lac St-Jean, de Chicoutimi et de la côte nord du Saint-Laurent

Description des cantons arpentés, explorations de territoires
et arpentages des rivières et des lacs.

De 1889 à 1908.

Publié par le Ministère des Terres et Forêts, 1908.

280 pages.


Remarquez l'utilisation de «do» (do = dito = ") dans la page ci-dessus. «Ditto» est un emprunt à l’italien toscan, ditto signifiant ‘dit’, participe passé de dire, ‘dire’ ; du latin classique dictus signifiant ‘dit’, participe passé de dicere, ‘dire’.

Il est utilisé pour éviter la répétition d’un mot dans une énumération: comme ci-dessus, de même, idem. Une paire de chaussures de cuir à 50 euros; dito à 60 euros.

Donc, le signe < " > ou certains guillemets fermants sont utilisés seuls pour ne pas répéter une entrée déjà écrite à la ligne précédente dans une table de données. Il est utilisé à chaque ligne où l’entrée est censée être répétée.

Photos: Pierre Rousseau - © 2020
Archives Pierre Rousseau
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lundi 29 juin 2020

Cartes postales - La Gaspésie

Ancienne carte postale touristique de la Gaspésie (Québec), côté nord, avec 6 lieux:

- Cap Bon ami
- Cap-Chat
- Gros Morne
- Mont Saint-Pierre
- Métis sur Mer
- Matane

(mis par ordre alphabétique semble-t-il)

et une carte routière simplifiée, de Sainte-Flavie à Rivière La Madeleine, en passant (?) par Murdochville, mais ne se rendant pas à Cap Bon Ami.



Numérisation: Pierre Rousseau - © 2020
Archives Pierre Rousseau
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dimanche 28 juin 2020

Personnellement - Charpentier-menuisier «A»

Voici mes attestations de cours: charpentier-menuisier «A» et «Code de sécurité de construction», en 1975-76, à Chicoutimi, cours donnés par la Commission scolaire régionale Saguenay - Service d'éducation des adultes.



Photos: Pierre Rousseau - © 2020
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vendredi 26 juin 2020

Humour - Daniel Lemire

Daniel Lemire au théâtre Saint-Denis (Montréal), le dimanche 27 janvier 2002. Billet acheté le 7 janvier 2002.

Au menu (?):
Edmond et le verglas ; Ronnie et la serre hydroponique ; Ronnie classique ; Le trafic ; L'espace ; Edmond et les assurance ; Oncle Georges et les vieux.

Photo: Pierre Rousseau - © 2020
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jeudi 25 juin 2020

Politique - L'événement Paul Sauvé

L'événement Paul Sauvé, (2003 à 2004)

Quatre lieux, dont celui de l'ancienne résidence de Paul Sauvé, feront revivre la mémoire du Premier ministre du Québec qui a pavé la voie à la Révolution tranquille:

- Église de l'Annonciation d'Oka.
- Parc nationale(sic) d'Oka.
- Maison et jardins Chénier-Sauvé.
- Musée de Saint-Eustache et de ses Patriotes.


21,5 x 2,5 cm.

Photo: Pierre Rousseau - © 2020
Archives Pierre Rousseau
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mercredi 24 juin 2020

Histoire - Gardienne du terroir

Gardienne du terroir

L'épopée de la famille Constantin

Les éditions Histoire vivante, Prévost, 2011.

96 pages.






Photos: Pierre Rousseau - © 2020
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mardi 23 juin 2020

Cartes postales - Recettes Hallmark

Jeu de 11 cartes postales individuelles de recettes Hallmark (Betsey Clark). Publiées dans les années 1970. En français. 11,5 x 17,0 cm. Non utilisées.












Photos: Pierre Rousseau - © 2020
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lundi 22 juin 2020

Littérature enfants/jeunesse - Thierry, tête de fer

(Jaquette)

Thierry, tête de fer

Alain Arvel

Éditions Spes, Paris, 1954.

Collection «Jamboree».

Illustrations de Michel Gourlier.

176 pages.




Note: une page non coupée 107-110.

Photos: Pierre Rousseau - © 2020
Archives Pierre Rousseau
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dimanche 21 juin 2020

Littérature québécoise - Le cinéma de Petite-Rivière

Le cinéma de Petite-Rivière

Louis-Philippe Hébert

Éditions du Jour, Montréal, 1974.

Illustré par Micheline Lanctôt.

Collection «Proses du jour».

112 pages.


Photos: Pierre Rousseau - © 2020
Archives Pierre Rousseau
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samedi 20 juin 2020

Livres et cahiers pratiques - Utiliser le pouvoir des pierres

Utiliser le pouvoir des pierres

Pour une vie énergique, en santé, en harmonie, à l'écoute de son moi intérieur.

Louise Scalabrini-Viger

(plus Le petit guide des cristaux)

Éditions du Perroquet, Montréal, 1993.

136 pages.


Photos: Pierre Rousseau - © 2020
Archives Pierre Rousseau
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Livres et cahiers pratiques - Roches et minéraux du Québec

Roches et minéraux du Québec

Guide d'excursion pour le collectionneur

Daniel J. Boivin

Conseil du développement du loisir scientifique, 1985.

22 x 28 cm; 142 pages.

Photo: Pierre Rousseau - © 2020
Archives Pierre Rousseau
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Sciences et techniques - Tour géologique de la Gaspésie

Tour géologique de la Gaspésie

H. W. McGerrigle

Gouvernement du Québec

Ministère de l'Énergie et des Ressources

Direction de la recherche géologique, 1985.

212 pages.

Photo: Pierre Rousseau - © 2020
Archives Pierre Rousseau
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vendredi 19 juin 2020

Simulacres - Chapitre 24 - Épilogue

Voici le vingt-quatrième et dernier chapitre de Simulacres (Pierre Rousseau, 1995; ancien titre Dague)

24 Épilogue

Jaouen Olier s'approcha du corps que les hommes venaient de   déterrer. Il souleva la toile. Pourtant habitué aux pires  scènes de mutilation, ce qu'il vit le figea d'horreur. «Un cadavre sur les bras, et quel cadavre! Le cerveau enlevé, la  région pelvienne extirpée - pourquoi mon Dieu, pourquoi? - les dents brisées, méconnaissable, non identifiable...»

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Le visage éclairé par un rayon de lune, une femme sortit le cerveau de son coffret et brisa la glace qui le recouvrait. De petites étincelles bleues issues de la substance libérée par l'extrémité des fibres nerveuses en activité coururent sur la surface plissée. Elle lança un long cri rauque qui ressemblait à un appel plaintif. Elle se tenait debout au centre d'une grande table circulaire autour de laquelle quatorze personnes étaient attablées devant des assiettes vides, comme s'ils attendaient un festin...

En levant le cerveau vers le ciel, la femme dit:

«Vioco vanu la tamps das poarras evac las alus oco prasants e   jemeos seuvas da le tarraur».
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Simulacres - Chapitre 23 - Compte-rendu du policier

Voici le vingt-troisième chapitre de Simulacres (Pierre Rousseau, 1995; ancien titre Dague)

23 Compte-rendu du policier

Fichier LAB - 028 - par Jaouen Olier

Je suis parvenu à reconstituer une bonne partie de la vie d'Amaël Daumal, surtout en ce qui regarde la période qui précéda le parricide.

Amaël était bien d'origine nord-africaine, par sa mère. Alors que son père, Hilaire Daumal - Québécois pure laine et importateur d'objets exotiques - était en voyage d'affaires au Moyen-Orient, et plus précisément à An-Akhro-Nîs, il rencontra Jirréel d'Akhro qu'il maria deux mois plus tard, avec l'appui inconditionnel de la famille. Il y resta un an, puis il revint au Québec, amenant quelques meubles, dont la petite table en ébène.

Amaël naquit là-bas. Sa petite soeur - Sidonie - deux ans plus tard à Montréal. Les années passèrent. Alors qu'Amaël avait sept ans, toute la famille séjourna un an au Moyen-Orient. C'est à cette époque qu'Amaël connut pour la première fois le couteau entrant dans la chair, sans bruit, là où il faut, pour tuer, en même temps que le corps, le cri dans la sombre ruelle sous les rires et les lanternes.

Puis le mariage d'Hilaire Daumal alla à la dérive, bien aidé en cela par les parents de sa femme qu'il avait fait venir au Québec.

Amaël fut un témoin passif du suicide de sa petite soeur de dix ans. Étendue dans son lit, elle s'est ouvert le poignet droit avec un couteau de cuisine. Ce suicide marqua Amaël psychologiquement. Et aussi physiquement. À mesure que le coeur de sa soeur ralentissait, le sang cessa de battre dans son bras gauche, provocant, pour l'avenir, une claudication de ce membre. Il s'avéra impossible de revasculariser le membre: il hérita ainsi d'une incapacité partielle permanente. Il boita cependant sans raison apparente. En fait, c'était comme si tout son côté gauche - celui qui «voyait» l'agonie de l'enfant - resta figé. Il eut aussi toute sa vie des douleurs ischémiques.

Témoin deux ans plus tard du meurtre de sa mère - il avait 14 ans - il ne dévoilera rien à la police, par peur d'être lui-même tué par son père. Hilaire Daumal, aidé de son fils, fit disparaître le corps d'une habile façon: ils le momifièrent. Le corps était dans l'appartement jusqu'à tout récemment, debout derrière un faux mur au fond du garde-robe. La famille de la femme fit des plaintes, hurla, menaça. Hilaire Daumal signala lui-même la disparition de sa femme à la police. Mais cette dernière ne retrouva jamais le corps. Pas de corps, pas de meurtre. Les parents de la victime retournèrent finalement au Moyen-Orient. Puis tout entra dans l'ordre.

Amaël suivit son père dans la consommation de drogues. Il devint un habile fraudeur pour arnaquer les gens et leur d'extirper l'argent nécessaire à l'achat de sa drogue. Puis il se sépara de son père, apportant la petite table d'ébène comme souvenir de la mort de sa mère. Il ne pouvait plus vivre en imaginant sa mère «vieillissant» près de lui sans qu'il puisse la voir et la toucher. Mais il lui parlait. Ou plutôt, il lui écrivait en introduisant, par un minuscule trou dans le mur sous le tableau de Hunt, de petits messages écrits sur du papier à cigarettes. C'est parce que sa mère ne vieillissait pas en beauté qu'il haïssait les personnes âgées.

Mais chaque jour, il voyait le «V», ce «V» inversé que la bague portée par sa mère avait fait après que la pauvre femme eut été poignardée. Elle n'avait pas crié: Hilaire Daumal avait appris l'art de manier le couteau. La première ligne vers le haut fut faite lorsque la victime tomba face contre la surface du meuble; la deuxième ligne formant le «V» fut tracée lorsqu'elle glissa vers le sol. Le grenat se détacha. Amaël le ramassa et le vendit pour de la drogue.

Cependant, ce «V» sur la petite table incrustait dans sa tête la première lettre du mot «vengeance», vengeance aussi pour sa petite soeur dont il tenait le père responsable. Mais on ne saura probablement jamais ce qui s'est passé lors du dernier voyage au Moyen-Orient.

Avec le temps, la maison d'appartements se changea en maison de chambre pour les personnes âgées.

Amaël avait déjà lu qu'il était impossible qu'un lecteur, à son insu, soit l'auteur des crimes décrits dans un livre. Cette affirmation l'obséda plusieurs années, soit jusqu'au jour où il lut la nouvelle «Ne vous retournez pas» de Frederic Brown, et qu'il adapta à sa façon. Il décida donc de tuer son père, puis de faire accuser une autre personne, accomplissant ainsi sa vengeance en toute sécurité. 

Son plan était à la fois simple et compliqué, car il amenait son père à s'intéresser au projet, et même à l'impliquer en lui proposant un jeu inoffensif: jouer un tour à un inconnu en lui faire accroire qu'il avait commis trois meurtres. Il laissa à son père le choix de la «victime»: ce fut Tudi Silver qu'il avait souvent vu passer sur le trottoir sous sa fenêtre. Il l'épia donc, suivant ses itinéraires et notant ses heures de sortie. Pendant ce temps, Amaël fabriqua le livre, rédigea le texte avec les données recueillies par son père, et relia l'ouvrage.

Hilaire Daumal croyait que la «victime» accourrait à l'appartement - sur le lieu du «drame» - pour être accueillie par les deux hommes en délire. Mais Amaël mit réellement du poison dans les médicaments et poignarda son père. Il avait modifié le texte en conséquence, à l'insu de ce dernier qui était analphabète.

Bien sûr, Amaël ne voulait pas que Tudi revienne à l'appartement. De toute façon, il aurait déjà quitté cet endroit pour regagner son logement qu'il ne quitterait plus pendant trois jours. Ce qu'il voulait, c'est que Tudi aille tuer le «BS», c'est-à-dire lui-même.

Mais Tudi Silver n'apprit les meurtres que le lendemain.

C'était un piège diabolique: Tudi tuait toutes ces personnes. En fait, il a fait les gestes criminels en donnant lui-même le poison à deux personnes âgées.

Au début, Amaël ne voulait pas tuer Tudi. Il lui suffisait de le dénoncer à la police. Puis des doutes sont venus. Il décida alors de le tuer en légitime défense, lorsqu'il viendrait rendre visite au «BS». En fait, Amaël haïssait réellement Tudi. Il semble qu'en prison - où ils se trouvaient en même temps - il se soit passé quelque chose de tragique pour Amaël, et que Tudi en fut la cause directe. Le journal intime n'est pas explicite sur ce fait.

Les doutes d'Amaël:

1. Tudi n'a pas lu le livre dans le parc comme il s'y attendait, n'apprenant les meurtres que le lendemain, par les journaux;

2. Il n'était plus certain que Tudi irait tuer le BS; et si Tudi allait directement à la police?

3. Il s'imagina que des indices dans le texte pouvaient le trahir (---> voir Traquenard). Et il avait raison, tel que Tudi me l'a expliqué: «Vous aurez tué trois personnes», «Vous venez de commettre vos deux meurtres». Le troisième meurtre? Tudi le commit, mais il n'était pas sur le lieu du crime. Bien sûr, en retenant la thèse du suicide, tout cela devenait plausible. Et le «Enfin si peu», qui aurait pu aussi le trahir.

Amaël décida donc de récupérer le livre à l'appartement de Tudi. Il simula un cambriolage, mais ne trouva pas le livre tombé derrière la table de chevet. Dans l'escalier, il bouscula Tudi, qui n'eut pas le temps de l'identifier. 

Devant cet échec, Amaël décida de poursuivre le plan initial et ne reprit pas le coupon de la consigne laissé la veille dans la boîte aux lettres. Il espérait ainsi que Tudi aille à son appartement pour le tuer. Mais ayant aperçu Pierrick Richelet avec Tudi, il se sentit perdu. Et dans un ultime effort pour tout annuler, et craignant que Tudi et Pierrick Richelet décident de venir lui rendre visite ensemble, il décida de récupérer le paquet à la consigne, c'est-à-dire le costume de livreur et la lettre empoisonnée. Mais lorsqu'il les vit, il changea de nouveau d'idée et s'enfuit par le passage de la rue Lagauchetière. 

Il décida alors de tuer Tudi et Pierrick. Et probablement Bérénice si elle se trouvait sur son chemin.

En touchant la dague, Tudi Silver laissait ses empreintes. Et cela devenait, aux yeux de la police, une tentative de meurtre dont Hilaire se serait miraculeusement sauvé dans la fuite. Une raison de plus pour que la police demande à Tudi où il avait caché le corps. Si, malgré tout, la police retrouvait Hilaire Daumal, ce dernier n'avait qu'à dire qu'il avait eu peur et qu'il s'était sauvé. De plus, c'était l'arme dont Hilaire Daumal s'était servi pour tuer sa femme: la police mettrait-elle ce meurtre sur le dos de Tudi Silver qui avait dix-huit ans à cette époque, et commettait alors des fraudes?

Un cadavre dormait debout près de Tudi! Il y avait aussi Amaël caché dans la cuisine, attendant de commettre son crime. Hilaire Daumal, sachant son fils tout près, ne s'attendait absolument pas à ce qui allait lui arriver.

Amaël a donc connu trois décès tragiques par une arme blanche: sa sœur, sa mère et son père. Aux deux premiers, il est resté passif; au dernier, il est passé à l'action. Une question demeure cependant: pourquoi a-t-il regardé mourir sa sœur? Amaël, enfant de douze ans, avait peut-être un sentiment ambigu vis-à-vis elle. Il avait peut-être une attirance sexuelle! Il en parle peu dans ses «écrits», ne mentionnant que deux fois cet aspect incestueux, dont cette phrase étrange «Sodinoa ne pes da saxa ja la seos», phrase énigmatique que son ordinateur réussit facilement à traduire : «Sidonie n'a pas de sexe, je le sais!». Seul un psychologue pourrait peut-être y voir clair.

Mais je suis certain qu'au moment du suicide, il n'y avait nulle gêne dans ses yeux, seulement ce constat de la mort telle qu'il l'avait vu au Moyen-Orient: brutale et inévitable. Il n'a pas fui la scène, même s'il se doutait que cela le ferait irréversiblement souffrir le reste de ses jours.

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Quand Tudi eut terminé de bien résumer les faits à ses amis, Pierrick s'exclama:

- C'est pas croyable, cet Amaël était un monstre!

- Je comprends cependant qu'il ait été perturbé! commenta Bérénice. Avec tout ce qu'il a vécu!

- Les gens ne sont jamais aussi méchants qu'ils le paraissent, dit Tudi. Mais Amaël haïssait particulièrement les personnes âgées.

- Il haïssait les personnes âgées? s'étonna Bérénice.

- Qui ne hait pas les vieux? s'enquit Pierrick à la stupéfaction de tous. Enfin, je veux dire: la vieillesse, qui est une caricature de tout ce que nous avons été: nos tics, notre démarche, nos accidents. Tous ces abus que la vie vieillissante ne cesse de compenser en déformant le corps.

Et Pierrick, qui n'avait pas peur des exemples ajouta: 

- Comme le bonhomme qui se masturbe toujours avec sa main droite: le pénis prend de plus en plus une courbure vers la gauche! Et je ne parle pas ici des sévices intérieurs du corps, mais de tout ce qui se voit et se touche. Et ne parlons pas du mental. L'humain change irrémédiablement en vieillissant!

- Depuis notre naissance, moralement et physiquement, on ne change pas, on se transforme! commenta Tudi. C'est pour cela qu'il est impossible de changer quelqu'un. Ou il faut alors le casser.

Mais Pierrick, heureux de reprendre les discussions à bâtons rompus avec Tudi, ironisa:

- Je ne m'entends pas dire à quelqu'un: «Cela fait vingt ans! Comme tu t'es bien transformé!»

- Ne dit-on pas aussi: il ne changera pas avec l'âge! répliqua Tudi.

- La vieillesse nous rapproche de la mort! lança Pierrick, comme un triomphe assuré du mauvais sort sur la vieillesse. Je ne veux pas entendre parler de moi en terme de cholestérol, de glycémie, de calcium, de potassium, de sodium, de tension artérielle, d'ostéoporose, d'angine, et de fardeau pour la société.

- La naissance nous rapproche déjà de notre mort! renchérit Tudi, pour tenter de court-circuiter cette discussion.

- C'est vrai dans le fond! avoua Pierrick, songeur.

Puis, se reprenant:

- Mais je ne peins jamais la chair des vieux. Ils sont trop près de la pierre grise. Moi, je veux une chair fraîche!

Il regarda Bérénice qui lui rendit son sourire.

- Bérénice est de la chair fraîche? s'indigna Tudi.

- Mets-en! lança Pierrick, provocateur.

- C'est comme si tu parlais de viande! s'indigna encore plus Tudi.

- Voyons Tudi, tu sais bien ce que Pierrick veut dire, le rassura Bérénice.

Puis elle ajouta, pour l'agacer:  

- Tu es jaloux qu'il me voie nue?

- Oui, je suis jaloux, avoua Tudi. Ou plutôt, j'envie sa chance de te voir si souvent ainsi!

- Ce n'est pas de la chance, expliqua Bérénice. Il fait ce qu'il a à faire. Et il lui arrive ce qui doit lui arriver. Il ne m'a pas gagnée aux cartes. Je ne suis pas une prostituée.

Tudi sut alors qu'il avait gaffé.

- Excusez-moi! Excusez-moi vous deux! Il m'arrive souvent de dire des imbécillités.

- Ça arrive à tout le monde, le consola Bérénice.

Tudi regarda la bague sertie d'un vulgaire morceau de verre grossièrement façonné et incrusté, et que la police avait généreusement laissé à Pierrick:

- Montre-moi la bague, dit-il.

Tout en tournant le bijou entre ses doigts, il murmura:

- Partir d'une nouvelle policière, et arriver à ce bijou! Bizarre!

- Tu te souviens de cette nouvelle policière au CÉGEP? demanda Pierrick à Bérénice. Tu avais tripé dessus.

- Vous êtes allé au CÉGEP ensemble? s'étonna Tudi.

- Bien sûr. Nous nous connaissons depuis toujours: nous sommes cousin et cousine.

Pierrick s'appuya sur le dossier de sa chaise, cherchant l'équilibre sur les deux pattes arrière. Puis il croisa ses mains sur sa nuque en disant:

- En tout cas, Tudi, tu as vécu, et nous aussi, une fichue d'aventure. Brève, mais passionnante.

- Dans le fond, on passe notre vie à régler des problèmes, philosopha Tudi. Celui-ci était un peu plus difficile, c'est tout. Mais se faire casser le nez par une roche de 3000 livres, et s'en sortir vivante, ce n'est pas donné à tout le monde.

Il regarda avec tendresse Bérénice qui arborait encore un pansement sur son nez. Elle lui fit une petite moue avant de lui prendre la main. Et Tudi ne put s'empêcher de conter un fait historique:

- Tu ressembles ainsi à la jeune fille de Chios - je veux dire sa statue bien sûr - trouvée dans l'Acropole d'Athènes, et à son nez cassé. Elle était quand même belle avec son sourire qui symbolisait la joie de vivre, et que dire de son beau visage, beau et calme comme le tien.

Fier que Bérénice le regarde maintenant avec admiration, Tudi espérait que la jeune femme se donnerait à lui corps et âme.

En apercevant Desrosiers arriver avec sa tasse, sa machine à cigarettes, ses livres et ses cahiers, il dit:

- J'ai une idée pour un nouveau roman.

- Est-ce que je vais avoir mon nom dans ton livre? demanda Desrosiers.

Tous éclatèrent de rire.

- C'est quoi, ton roman? demanda Pierrick, toujours curieux.

- C'est un peintre et un écrivain qui se rencontrent à une terrasse. Le peintre est assis avec une belle jeune femme. Les deux hommes s'engueulent au début, mais ils deviendront les meilleurs amis du monde.

Tout à coup, Tudi sortit un petit objet de sa poche et le posa sur la table.

- Qu'est-ce que c'est? s'étonna Pierrick.

- C'est une planche d'imprimerie servant à insérer les lettres formant un paragraphe, expliqua Tudi.

- Où l'as-tu trouvée?

- Hier, à mon appartement, dans le fond d'un tiroir. Amaël l'avait cachée lors de son cambriolage. Regarde, il y a encore quelques lettres dessus.

- Mais c'était une preuve flagrante de culpabilité! s'exclama Pierrick.

- En effet. Mais ce n'est pas tout.

Il sortit un petit tube de sa poche et annonça:

- Le poison des crimes!

- Merde! fit Pierrick en ramenant sa chaise sur quatre pattes.

- Tu ne l'as pas ouvert j'espère? s'inquiéta Bérénice.

- Non!

- Tu vas les rendre à la police? demanda Pierrick avec une perplexité non feinte.

- Non. Au cas où! répondit Tudi en les enfilant dans sa poche, faisant rire tout le monde par sa mimique assurée. Au fait, Amaël avait acheté des billets pour le Pérou. Déguisement, fausse identité, faux passeport.

Après un moment d'hésitation, il ajouta:

- Détail intéressant: sa date de naissance est la même que la mienne: le 9 avril 1959!

- Et de la mienne aussi par le fait même, s'étonna Pierrick, complètement ahuri.

Un homme s'approcha d'eux.

- Tudi, je te présente Jojakin, fit Pierrick, surpris. Le propriétaire du chalet. T'inquiète pas, il ne portera pas plainte!
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Simulacres - Chapitre 22 - Dans l'atelier

Voici le vingt-deuxième chapitre de Simulacres (Pierre Rousseau, 1995; ancien titre Dague)

22 Dans l’atelier

Dissimulé derrière un petit meuble sur la mezzanine, Tudi voyait distinctement, tout en bas, les mains d'Amaël Daumal descendre lentement les chaînes du palan, presque imperceptiblement, comme l'aiguille des heures d'un balancier. Il pensa au «Pendule» d'Edgar Allan Poe, et cela le remplit d'horreur, même si ce n'était pas un croissant d'acier étincelant qui se balançait au-dessus de ses amis. Sans sifflements, mais avec le léger cliquetis des chaînes glissant l'une sur l'autre, une énorme pierre descendait perpendiculairement aux victimes ligotées et bâillonnées sur une large pierre plate, et sur laquelle elles seraient effroyablement écrasées.

Tudi regarda les cheveux noirs ébouriffés d'Amaël, son avant-bras soutenu par un morceau de drap, et son sourire d'obsédé. Mais dans ses yeux, il ne voyait pas de la démence, seulement un calme figé, et la certitude d'avoir fait le bon choix pour d'obtenir le résultat attendu.

Les jambes de Pierrick gigotaient frénétiquement, telle une araignée écrasée. À hauteur du visage de Bérénice qui ne bougeait plus, un mince filet de sang coulait sur la pierre. «Inconsciente ou morte?» se demanda Tudi avec angoisse. Malgré tous les efforts qu'il faisait pour ne pas y penser, il imagina le visage de Bérénice se déformer sous la pression de la pierre, ses os éclater dans un craquement sinistre et son sang jaillir...

Pour exprimer ses souffrances, Bérénice avait voulu crier, mais le bâillon sur sa bouche l'en avait empêché. Immédiatement après, sa tête s'était immobilisée sous le poids de la pierre, comme dans un étau. Elle avait senti la pression sur son visage, puis la petite douleur sur l'os du nez. Elle avait senti la chaleur du sang près de son oeil, sur sa joue, dans son cou. Puis était venu le voile noir... Mais elle n'avait pas eu peur!

Amaël hurlait: «Tu seras content, Pierrick. Toi et elle, écrasés, devenus de la chair véritable sur la pierre, fondue en elle, comme tu le voulais. J'ai assez de raisons pour justifier mon geste. Mais j'ai assez écrit. Aujourd'hui, j'imprime le sceau de ma haine!»

Tudi constata qu'il était trop tard pour dévier la trajectoire du destin soumis à l'attraction terrestre, cette loi physique qui permettait à l'homme de garder les deux pieds sur terre.

«Au moins, sauver Pierrick», pensa Tudi, avec une détermination teintée de rage. «Et exterminer ce maniaque!» conclut-il avec une fermeté qui le surprit, lui qui, dans des moments intenses, perdait habituellement toute lucidité, articulant ses actes avec hésitation, ou préservant peureusement une immobilité totale.

Il était cependant ignorant du moyen à prendre pour empêcher la pierre de descendre. Il s'en voulait pour sa lenteur d'esprit à décider dans des situations urgentes.

Tout à coup, du coin de l’œil droit - l’œil qui guette, cherche et pense - il aperçut la petite arbalète posée sur un meuble. Tendre la main? La saisir? Tudi n'a pas hésité. Il l'arma. Mais le déclic alerta Amaël qui arrêta le mouvement des chaînes en levant les yeux vers la mezzanine. Il écouta pendant une éternité. Ne voyant rien bouger, rassuré, il reprit son geste de la main et du bras, mais à un rythme un peu plus rapide!

Tudi prit conscience que l'arme meurtrière était prête dans sa main, comme si quelqu'un la lui avait donnée. Il frissonna en sentant le contact froid du métal. Il pressentit que, dorénavant, la magie devra se substituer à la précision pour guider la pointe de la flèche jusqu'au coeur d'Amaël, et cela d'une façon si soudaine que la main tenant la chaîne devra s'ouvrir au lieu de se fermer. Car c'était le résultat de son action qui permettrait d'éviter le déroulement effréné de la chaîne entraînée par la chute d'Amaël sur le sol, projetant du même coup la lourde pierre sur les corps de Pierrick et Bérénice. Ce serait alors comme s'il tuait ses amis, se substituant au meurtrier, au lieu de le laisser accomplir son action jusqu'au bout.

Il pouvait encore se sortir de la scène, et n'être qu'un figurant comme il l'avait toujours été. Mais n'ayant plus rien d'autre à faire ou à espérer, Tudi n'avait plus le choix: il devait tirer. Il mira soigneusement, et pressa la détente. Comme dans un long ralenti, la flèche traversa l'espace jusqu'au poignet de la main qui tenait la chaîne, perça la chair et les tendons - et même l'os lui-même - et alla se ficher dans un tableau. La grimace de douleur et de haine sur le visage d'Amaël effraya Tudi plus que la malchance d'avoir raté son coup, même si la main avait lâché la chaîne.

Devant la fatalité d'avoir joué sa dernière chance, Tudi sortit de sa cachette et se dressa sur le bord du vide, comme un Goliath vaincu, mais encore debout. Amaël le regarda, et dans un sourire figé de douleur, il cria:

- Bienvenue, Monsieur Silver. Après m'avoir lapidé, les humains veulent me transpercer maintenant. Mais il est trop tard pour ces deux-là. Ils auront droit à la grande lapidation. «Alors le peuple de cette ville lapidera le fils rebelle et insolent», «et ils lapideront la fille, parce qu'étant dans la ville, elle n'a pas crié», «Qu'ils périssent accablés de pierres». Moi-même, qui ait touché la montagne, je serai lapidé de nouveau. Les chaînes et les persécutions m'attendent. Je déteste tout ce qui exsude du corps: la sueur, les larmes, le pus, le vomi, et encore plus les crachats, car ils sont volontaires. Mais j'aime le sang, et je vais presser tes amis comme des éponges. La chair est sacrifice, et je vais détacher la chair en lambeaux, car la convoitise vient de ceux-là qui courent après les voluptés de la chair. Et je suis corruptible de corps et d'esprit.

Il leva sa main très haut, et malgré la blessure douloureuse d'où giclait un sang clair, il saisit la chaîne dans le but évident de lui donner une longue et vive impulsion. Ses muscles se tendirent, comme se tendit le regard de Tudi voulant annihiler le meurtrier qui allait abaisser la pierre d'un coup brusque. Mais Amaël hurla:

- Et ses seins sont deux grappes d'où dégorgera le lait sur le rocher nu. Nul ne méprisera ma mère, car je suis le premier-né. Et je suis comme une colombe sur les genoux de ma mère...

Soudain, le bruit assourdissant d'une explosion retentit près de l'oreille de Tudi qui vit la tête d'Amaël exploser en éclaboussant de sang et de cervelle la pierre monstrueuse. Puis le corps s'écroula comme une masse de muscles et d'os disloqués.

Jaouen Olier sortit de l'ombre, tenant un revolver dans sa main à peine tremblante.

- À temps, juste à temps pour sortir du labyrinthe! dit-il.

Mais sans attendre une quelconque explication, l'esprit résonnant encore du bruit et de la peur, Tudi dégringola l'escalier, empoigna les chaînes, puis se figea dans une hésitation fébrile. Jaouen, qui l'avait suivi de près, le regarda, étonné:

- Qu'est-ce qu'il y a? demanda-t-il, crispé dans l'attente d'un danger dont il ne soupçonnait peut-être pas l'existence.

- Je ne sais pas quelle chaîne tirer, avoua Tudi. Il ne suffirait de presque rien pour les écraser!

- Donne, lança Jaouen en saisissant les chaînes.

Il manœuvra habilement, et la pierre se souleva et s'éloigna des deux corps qu'Amaël avait pris bien soin de dénuder intégralement pour ne pas que les tissus souillent la chair. Tudi aperçut les yeux remplis d'horreur de Pierrick, et les yeux de Bérénice, fermés sur la mort. Car c'était dans le regard plus que dans les battements du cœur ou les soulèvements d'une poitrine qu'il voyait le mieux la vie, alors que les yeux disent les émotions.

Un véritable branle-bas de combat se fit entendre sur la mezzanine. Pendant que Tudi dénouait les bâillons et les liens, policiers et ambulanciers martelèrent le plancher de bois, puis l'escalier.

Jaouen regarda le corps d'Amaël Daumal étendu à ses pieds. Malgré lui, mais volontairement, il avait atteint, par la balistique, le plus merveilleux labyrinthe qui puisse exister, le cerveau, lequel formait maintenant un chaos...
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